Prochoros Cydonès ou le rationalisme thomiste face au palamisme.
Romain Feeser, École des Chartes
Cette intervention sera l’occasion de présenter le travail que je mène – dans le cadre d’un master dirigé par Michel Kaplan et d’une thèse d’École des Chartes menée sous la direction du même professeur et de Brigitte Mondrain – sur ce moine athonite du 14e siècle, impliqué dans la querelle hésychaste ou palamite qui agita l’Église byzantine durant plusieurs décennies. J’entreprends en effet l’édition complétée d’une traduction et d’un commentaire d’un opuscule polémique où Prochoros Cydonès cherche à réfuter de manière systématique et rationnelle une profession de foi contemporaine, de facture palamite et faite par des moines athonites.
Prochoros Cydonès, latiniste aguerri, traducteur – seul ou en collaboration avec son frère Démétrios – de l’oeuvre de saint Thomas d’Aquin ou de saint Augustin, use de la scolastique mise alors au point en Occident pour pourfendre ces adversaires. Il n’a de cesse de dénoncer les pratiques mystiques en vogue qui permettraient d’accéder directement à la connaissance de Dieu et se veut le défenseur de l’orthodoxie en soutenant une approche indirecte de la divinité, suivant en cela le pseudo-Denys l’Aréopagite. Contrairement à son frère Démétrios, Prochoros Cydonès, malgré les attaques et les accusations dont il a été l’objet, semble être toujours resté fidèle à l’Eglise orthodoxe et a cherché à défendre jusqu’au bout la conformité de ses théories face au patriarche Philothée Coccinos. Et pourtant, il fut bel et bien condamné et excommunié par ses juges, ce qui semble avoir précipité sa fin, sans que son frère haut placé ait pu venir à son secours. Ainsi condamné, Prochoros Cydonès, antipalamite et latinophrône, a malgré lui contribué au rejet de l’influence intellectuelle occidentale à Byzance et assuré la victoire du palamisme dont l’orthodoxie est définitivement reconnue et désormais perçue comme un rempart spirituel en ces temps troublés.