La vision du barbare en Orient à l’époque protobyzantine : l’apport des sources syriaques.
Claire Fauchon, Université de Versailles St-Quentin-en-Yvelines
Dans ses analyses sur Byzance, le barbare et l’hérétique, É. Patlagean concluait que dans « la lutte de Byzance contre les peuples qui l’entourent, l’accent est mis désormais sur le motif de la chrétienté, d’une chrétienté qui demeure définie en même temps comme porteuse des valeurs universelles de la romanité ». Fantasmes répulsifs, les barbares sont pourtant loin d’être perçus comme un tout homogène. Notre but est d’étudier comment la notion de barbare et les topoi qui lui sont associés sont utilisés à la haute époque byzantine dans la documentation syriaque, par des populations chrétiennes de l’Empire byzantin, imprégnées de culture gréco-romaine mais dont l’identité même est d’appartenir à un groupe hétérodoxe qui doit résister à plusieurs envahisseurs : perses, puis arabes. Nous nous intéresserons plus particulièrement à un cycle légendaire syriaque connu sous le nom de Légende d’Alexandre. Ce cycle est composé de plusieurs textes rédigés en syriaque entre 629 et 677, au cours d’une période particulièrement trouble en Orient : invasions des Perses, massacres des chrétiens, reconquête byzantine puis invasions arabes. Ces textes mettent en scène Alexandre qui part civiliser les barbares aux confins de l’oikoumene et nous renseignent sur les représentations du barbare à cette époque. Cette documentation syriaque offre un point de vue complémentaire des sources grecques et permet d’examiner, sous un autre angle, les dynamiques socio-culturelles à l’œuvre en Orient, ainsi que la plasticité des stéréotypes et l’ampleur des interactions culturelles à l’œuvre dans ces sociétés orientales multiculturelles et multiconfessionnelles du haut Moyen Âge.