La vie de Porphyre de Gaza par Marc le diacre (BHG3 1570) : la conversion du temple de Marnas en église chrétienne.
Anna Lampadaridi (Université de Paris IV-Sorbonne)
La Vie de Porphyre est un texte hagiographique de l’époque protobyzantine qui se présente comme l’œuvre de Marc le diacre, un personnage inconnu par ailleurs qui se donne pour le fidèle disciple du saint dont il raconte la vie. La datation du texte pose des problèmes : écrit après la mort du saint en 420, et semble-t-il, peu après, un emprunt à l’Histoire Philothée de Théodoret oblige à dater l’état du texte dont nous disposons après 440. Dès l’époque de Tillemont, la Vie de Porphyre s’est trouvée au centre d’un grand débat concernant sa valeur historique, à cause des anachronismes qu’elle contient. Porphyre joue un rôle clé dans la christianisation de Gaza, qui vers la fin du IVe s. est encore une cité majoritairement païenne. Le point culminant de son activité et, en même temps, le noyau du récit est la démolition du temple principal de la ville et l’édification sur ses débris de l’église eudoxienne. La Vie nous offre un des rares récits, et peut-être le seul, qui décrive de façon si vivante et pittoresque comment la christianisation d’un sanctuaire païen a eu lieu. Cependant, cette église n’est pas connue par ailleurs, sauf deux témoignages de St. Jérôme de valeur ambiguë, et son existence n’est pas confirmée par l’archéologie. En outre, la conversion d’un temple en église est souvent considérée comme un phénomène postérieur à l’époque à laquelle le récit de la Vie prétend se référer, à savoir le début du Ve siècle. C’est ce dernier point qui va nous intéresser. Nous essayerons de voir si la construction d’une église sur les débris d’un temple païen à Gaza au début du Ve siècle pourrait avoir une substance historique. À travers l’examen du phénomène des transformations des temples en églises dans sa diversité nous mettrons en évidence des catégories générales. En situant l’épisode décrit par Marc dans ce contexte, nous jugerons de sa substance historique en montrant que rien n’oblige à le considérer comme anachronique.